samedi 20 octobre 2012

Récit du 15 août : J+38

J+38 : Refuge de la Tagnarède (1045m) - Pic des 4 thermes (1156m) - Pic Sailfort - BANYULS SUR MER 
D+  ??? (Le bain à l'arrivée a fait planter les mesures de la montre altimètre...
D-  ???   mais par déduction : 500+ et 1500- )

Les martiens attaquent ?
Ou bien est-ce une manifestation
de Dieu ?
Une nuit tout à fait spéciale, l'environnement s'y prête : cette lisière de hêtraie magnifique en crête frontière qui plus est, a nourri nos rêves. Encore endormi, en préparant mon sac, j'ai l'impression d'être spectateur de mes gestes automatiques. La porte du refuge s'ouvre sur la forêt silencieuse et claire. Le versant français forestier et exposé nord-est est traversé par les rayons du matin. Quand tout à coup, il semble se passer quelque chose ; la lumière, l'ambiance change. Nous levons les yeux... la brume... elle arrive, d'abord légère puis de plus en plus épaisse, comme un tsunami venu d'Espagne, elle va nous submerger. Associée aux rayons du matin, elle embrase le sous bois, de couleurs orangées surnaturelles.  Nous nous doutons que ça ne durera pas et sautons sur l'appareil photo.
Pays Basque ? Non !
Plié en deux et pas de fougères !
Quelques minutes plus tard nous sommes dans une  brume épaisse portée par un vent frais ;  pour cette dernière étape, jamais nous n'aurions imaginé cela! Autre inconvenue sérieuse, nous sommes pris rapidement de coliques, enfin surtout moi. Nous n'avions pas jugé utile de mettre des cachets de purification dans l'eau de la fontaine de Tagnarède... Erreur... Il y a beaucoup de vaches dans le secteur, la source est contaminée sans aucun doute. Bien sûr ce n'est pas la première fois de la traversée (Ah ! Les charmes du pays basque !), mais là ç'en est trop pour mes intestins et mon organisme affaiblis. Plié en 2 par les crises, je suis en piteux état et dois m'arrêter toutes les 10 minutes dans les fougères. Nous avons heureusement prévus de l'imodium : j'en prends une double dose qui peu à peu calme les spasmes. Autre problème, je souffre de plus en plus d'un genou dans les descentes raides depuis le Carlit et le temps caniculaire. Bref, mon corps me dit comme il peut qu'il est temps que ça se termine! Après le pic de Sailfort, que 2 VTTistes tentent de grimper le vélo sur le dos (???), la brume se déchire en bas, nous commençons à voir la mer et le final plus clairement. Nous croisons quelques randonneurs montant parfois en famille, certains nous demandent si nous sommes des GR10stes, oui mais non, désolés de les décevoir !  Au fur et à mesure de cette ultime descente nous avons l'impression d'évoluer dans un four à chaleur tournante. Pour 2 trégorois habitués aux brises piquantes de la Manche ou aux vents froids de montagne, c'est déroutant, inconcevable même ! 


Tabac d'Espagne
La Fontaine des Chasseurs
Nous nous arrêtons déjeuner à la fontaine des chasseurs, îlot ombragé de relative fraicheur. L'eau est merveilleuse. Une autochtone de Banyuls arrive alors chargée de jerricans vides. Elle s'assoit d'autorité à la meilleure place, sur la petite margelle ancestrale. Nous réalisons immédiatement vu le nombre de bidons à remplir (10x10 litres) et le débit de la source, qu'elle en a pour un bon bout de temps ! Nous voilà donc tous les trois dans cet oasis minuscule, causant de la pluie et du beau temps, de la pureté de cette eau, de la sagesse des catalans de préserver cette manne gratuite, tandis que l'eau chante en remplissant les bidons. 4 Gr10istes passent, déçus :  pas de place pour eux ! Las, ils s'arrêtent quelques mètres plus loin et remplissent leurs bouteilles.

Mer !
 Le sac plus léger que jamais nous traversons ensuite le vignoble de Banyuls et croquons dans quelques grappes au passage : délicieuses. Et nous voilà à Banyuls, peaux rouges à New york, suivant encore le balisage rouge et blanc du Gr10. Je réalise que je ne vais pas être submergé d'émotions... Pourtant, avant le départ, toutes les fois où j'avais imaginé cette arrivée, je pensais tomber à genou sur la plage façon Willem Dafoe dans Platoon, les yeux humides, l'esprit traversé par tout un tas de flashback romantiques : moi le petit asthmatique à qui on avait prescrit l'air des montagnes  en traitement. Gamin marchant en tête sur les sentiers des Alpes, des Pyrénées. Attrapant des vairons à Payolle, guettant la caravane du tour dans le Tourmalet.  La patte d'ours encore garnie de lambeaux de cuir et de poils que j'avais vu à 7 ou 8 ans clouée sur une porte de grange en haut du village de Guchen. "Cette patte, je l'ai toujours connue !" nous avait déclaré fièrement le vieux montagnard qui nous l'avait indiquée...................... 

Le bras tendu c'est bien...
avec de l'aide c'est mieux !
La plage apparait et non, je ne ressens rien de tout ça, juste une immense satisfaction, de la fierté et beaucoup d'étonnement : We did it !  Nous nous prenons en photo devant les estivants, mais tout à coup surgit une jeune naïade seins nus et voluptueux qui se propose de nous tirer le portrait ! Comment espérer meilleur début à ce retour à la civilisation ! J'aurais presque proposé plutôt à son petit copain de prendre la photo pour qu'elle puisse poser entre nous deux, mais l'altruisme de sa douce n'a pas l'air de lui susciter un grand enthousiasme !!! ^^ Après coup nous sommes morts de rire.

Bronzage fille
Bronzage garçon
 Il est dans les 13h30,  nous nous débarrassons des tâches nécessaires en premier : l'office du tourisme nous indique le seul hôtel encore disponible ( Hotel Canal, bon marché et à la clientèle constituée pour l'essentiel de randonneurs et de saisonniers ). Nous y posons nos sacs puis en ville achetons une tenue de touristes : short et chemisette pour moi, robe pour elle.  Quel bonheur cette odeur de propre ! En retournant à la plage pour le bain indispensable, nous croisons   Nils et Maibritt les danois qui arrivent ! Quelle surprise !  Nous voilà barbotant ensemble dans la méditerranée puis sirotant une bière en terrasse d'une brasserie.


Emotion gastronomique
On va tout goûter ou presque !
Nous avions réservé une table au minuscule  "El Xadic Del Mar " : comme si un caviste avait  transformé son échoppe en bar tapas gastronomique ouvert sur la rue... Unique ! Apothéose culinaire, orgie de mets fins et délicats, un patron super, des vins qui explosent dans la bouche, une ambiance d'habitués. Des produits frais et des épices  qui secouent nos papilles endormis par des semaines de déshydraté. Nous sommes au 7ième ciel ! En prenant l'air, nous faisons  la connaissance d'un vigneron bio haut en couleur qui mange une assiette de charcuteries catalanes posée dehors sur un tonneau tout en descendant des vins de son choix (et il y en a !) en compagnie d'un de ces clients caviste venu exprès de Rhône-Alpes pour le voir et d'ouvriers viticoles. Il nous loue en particulier une des cuvées de son  domaine ("Le Casot de Mailloles"). Je tairai le final de cette soirée ! Tout ce que j'accepterai de dire c'est que je tiens à remercier le patron d'El Xadic Del Mar pour sa générosité, sa patience et  son talent!  0:-)
Dans le train...Montagne Pyrénées
Dernier coup d’œil à la plage
Voilà donc le point final qu'il manquait à cette aventure. Le lendemain, dans le train la tête embrumée et les entrailles toujours retournées par cette cochonnerie d'eau de Tagnarède, nous retournons vers notre véhicule, nos amis,  la Bretagne ensuite et le boulot... Mais ça c'est une autre histoire.

8 commentaires:

  1. je ne dirais encore qu'un mot : BRAVO !!!
    et merci pour cette traversée racontée avec brio .
    gros bisous
    karine

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  2. Remarquable le courage de ces deux bretons, qui ont gardé le sens de l'aventure de leurs aïeuls qui allaient pécher les poissons dans les océans démontés.
    Ce récit est sublime et que dire paysages à travers les photos de cette traversée des Pyrénées par Le HRP, un rêve pour moi.
    Merci
    Cordialement
    Patrick

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  3. ça c'est un trek!
    Bravo pour ce parcours!

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  4. Super parcours !
    Combien de kg avez vous perdu au final ?

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    1. C'est assez bizarre au final puisque je n'ai perdu que 7 kgs environ alors que j'avais l'impression d'en avoir perdu le double, ça doit être parce que je suis sec du départ et que j'ai surtout perdu du muscle ( épaules --- bras - cuisses -- ). Ce que je ne comprends pas c'est qu'au bout du 1/3 du parcours j'avais déjà perdu 5 ou 6 kgs mais que je n'avais pas cet aspect décharné de la fin... Encore plus bizarre Carine n'a perdu que 1 à 2 kgs grand maximum. Elle comme moi avons continué à perdre du poids pendant 1 ou 2 semaines après. Pourtant aujourd'hui nous sommes plus lourd de 2 kgs qu'avant de partir... Bref ça déclenche des choses dans le métabolisme qu'on ne maîtrise pas trop ! Et après le retour ça fait un effet de rebond ...

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  5. Bonjour,
    J'avais suivit avec intérêt la préparation, j'ai adoré le récit. Et justement c'est sur ce point où je suis le plus admiratif. Certes, effectuer la traversée est une chose, mais reprendre ensuite tout cela par écrit, je suis admiratif. Je fait modestement la même chose sur mes randos d'un ou deux jours, mais un tel périple ! BRAVO !!! Je vais démarrer en juillet une première portion de cette traversée et je ne sais pas encore si j'aurai la volonté de tout écrire ensuite. Ce blog est une merveille d'informations utiles et pratiques. Merci à vous.

    Ludovic
    http://randoludo.blog4ever.com

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  6. Merci ! J'ai visité ton site : : très agréable et pas mal de randos bien variées point de vu style et saison : si j'avais l'opportunité d'habiter les Pyrénées à l'année c'est le genre de site que j'aimerais alimenter !

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  7. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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